Samedi 30 novembre 2019. J154. Palerme un 30 novembre, c’est un grand soleil, des pêcheurs qui vendent leurs poissons au port, des ruelles pleines de commerçants de rue, des fruits et des légumes qui débordent des étales,… Et pas de touristes. La vraie vie quoi.
Nous débarquons d’abord dans le trafic italien. Pierre ne sait pas trop si les feux de signalisation servent à quelque chose. Il se débrouille et nous trouvons un stationnement le long d’un affreux boulevard très passant. C’est ce qui nous paraît le plus sûr. Nous sommes en face du port, à deux pas de la vieille ville. C’est bien.
Journée anniversaire à Palerme
Capucine déclare “la journée du bonheur” officiellement ouverte. Et la journée commence par une marche au soleil le long du port, des bateaux, des pêcheurs. Puis nous pénétrons les rues et ruelles de Palerme. Les commençants son en train de sortir leurs étals. Les balcons jouent à touche touche. Le linge sèche pendu à son fil. Nous nous baladons le nez en l’air. Nous tournons en rond autour de la fontaine de Pretoria, entrons dans l’église San Giossepe au moment de l’eucharistie. Lison prend naturellement la file des paroissiens en marche, nous la suivons, le prêtre nous donne la communion et un large sourire. Palerme compte près de 600 églises et couvents. En 1723, on y dénombrait 107 princes, 76 ducs, 104 marquis et 39 comtes dont chacun, ou presque, disposait d’un palais en ville ! La ville recèle dont d’une flopée de monuments en plus ou moins bon état mais souvent plein de charme.
Aujourd’hui nous voulons permettre à Capucine de se faire percer les oreilles. Alors nous cherchons. Une bijouterie nous dit qu’il faut aller en pharmacie. Puis la pharmacie nous dit qu’il faut aller à une autre pharmacie. Et puis l’autre nous recommande une bijouterie où effectivement, on perce bien les oreilles.
La voilà heureuse, elle a eu mal mais nous a dit fièrement que ça allait. Elle se sent un peu plus grande. Un cap de passé.
La chapelle Palatine, mélange arabo-normand-byzantin
Un bon plat de pasta dans une petite trattoria et nous sommes armés pour partir à l’assaut de palais royal de Palerme. Nous voulons surtout y voir la chapelle Palatine, premier monument d’art byzantin sur notre route vers l’est. Elle est étincelante en vrai, jamais les photos vues auparavant n’avaient pu transmettre l’éclat de ses mosaïques dorées. Ici, les filles peuvent facilement identifier le style artistique islamique qu’elles ont vu à Séville et Grenade, fait exclusivement de motifs géométriques, du style byzantin qu’elles découvrent où une grande partie de la bible est représentée. Nous nous amusons à identifier les scènes que nous connaissons. Commencée en 1132 par le premier roi normand de Sicile, Roger II, l’intérieur est un témoignage du mélange des cultures de la Palerme normande. Avec ses successeurs, Frédéric II, Guillaume Ier et Guillaume II, ils réussirent le miracle de faire cohabiter les deux civilisations et de mixer des cultures profondément différentes.
Palais normand
Le reste du palais normand, nous passons vite. La visite permet d’accéder à la salle du parlement et autre salles officielles. La Sicile, comme les régions de Sardaigne, le Trentin, le Frioule et la Vallée d’Aoste, bénéficie d’un statut d’autonomie et donc d’un parlement régional. Lison, qui tente de comprendre le fonctionnement politique des pays n’y comprend plus rien. “Mais Maman, le parlement c’est pour parler et faire les lois d’un pays. Mais la Sicile, c’est pas un pays !” Oui, comme l’Ecosse dont nous avons vu le parlement mais qui n’est pas non plus un pays. Que les sociétés humaines sont compliquées !
Jardin botanique
Aujourd’hui, Capucine nous a demandé de visiter l’Orto botanico de Palerme, ce jardin qui, pendant le XIXème siècle, fut le point de convergence des passionnés de plantes. De retour d’expéditions lointaines, de nombreux explorateurs vinrent y semer leur petite graine ou y enfouir leur bouture, tant et si bien que Palerme devint incontournable pour tous les botanistes d’Europe et de Méditerranée.
Nous voilà donc en route pour une seconde traversée de la ville par les quartiers populaires. Un marché où des dizaines d’étals envahissent la rue, où des scooters zigzaguent entre les chalands, où les poubelles dégueulent, les marchants gueulent, les hommes jouent aux cartes en s’engueulant. Le bruit de la vie. Ha, voilà une perche à selfies. Capucine est équipée pour mieux filmer ses reportages. Et ça commence maintenant, au jardin botanique ! La voilà qui teste, qui filme, qui commente “Whouaa, regardez comme ces cactus sont beaux !…” Nous la laissons s’amuser avec ses sœurs mais les bases d’une vidéo publiable n’y sont pas : pas d’information et surtout, des images qui bougent bien trop. On s’appliquera une prochaine fois, pour l’instant, nous profitons de ce grand jardin à la tombée du jour. Des cactus et des plantes grasses. Des agrumes et surtout d’étranges citrons. Des bambous qui sonnent juste quand on les toquent. Cette espèce de petit mimosa qui referme ses feuilles tout timidement à nos caresses. Ce gigantesque ficus-cathédrale qui fait retomber ses branches en racines pour soutenir leur largeur indécente. Tiens, une graine de ficus-cathédrale. Ça pousse en Aveyron ?
Respirer à Ficuzza
La journée fut remplie, nous en avons profité avec légèreté. Un beau 30 novembre sans manteau. Mais maintenant il nous faut trouver un lieu où dormir. Pas question de rester le long du grand boulevard où nous nous sommes garés ce matin. Trop de trafic. Trop agité. À Palerme, deux choix. Soit une aire de camping car, un parking, payant, en périphérie et fermé par des grilles. Bof. Soit nous roulons pour rejoindre un spot plus nature dans la montagne sicilienne. Nous optons pour la seconde option même si ça nous demande de rouler alors que nous sommes déjà bien fatigués. Mais nous aurons bien fait. Nous arrivons vers 19h dans la forêt de chênes de Ficuzza. Seuls au bord d’un chemin. Air frais. Silence. Nous sommes mieux ici.
Souffler
Le moment est venu pour souffler nos dix bougies, Capucine n’a pas perdu son cap. Nous ressortons le fromage-petit jambon, lui repiquons ses piques d’hérisson, et cette fois-ci, les allumons. “Joyeux anniversaire,…”
Capucine souffle, les bougies s’éteignent, et se rallument. Mince, ce sont des bougies magiques. Tout le monde se met à souffler de plus belle et les bougies se rallument sauvagement. Un incroyable nuage de fumée s’amoncelle dans notre petite salle à manger qui est absolument incapable de les dissiper. Mayde, un verre d’eau pour éteindre tout ça avant l’asphyxie générale. Un camping-car n’est pas une maison.
Nous rigolons. Patates ! Maintenant. Pour déguster ce fromage doublement fumé.
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