Dimanche 21 juin 2020. Comment parler de Auschwitz à ses enfants de 8 et 10 ans ? Franchement j’aurais préféré m’en passer et laisser le soin aux professeurs de le faire. Mais nous passons à côté, c’était prévu de longue date sur le trajet initial. Et même si c’est dur, Pierre et moi nous y tenions. Ça fait fait partie de l’instruction, de ce que l’on doit savoir de l’histoire. Ce qui est vraiment compliqué finalement, c’est de trouver le bon dosage, de juger ce que nos enfants sont capables de comprendre et d’entendre sans non plus leur faire faire des cauchemars et sans les dégoûter à jamais de l’être humain. Huit ans, c’est jeune nous semble-t-il pour comprendre ce pan de l’histoire. Pour Capucine c’est différent, elle connaît l’existence des camp de la mort, elle l’a “lu dans un livre”. La voilà qui explique elle-même avec ses propres mots. Nous nous chargeons de préciser. Ces temps de dialogue en famille sont si précieux.
Auschwitz-Birkenau
Pour cause de pandémie, la visite du site est encore fermée. C’est dommage pour Pierre qui voulait la faire, pas pour moi. Nous avions été prévenus, cette visite est dure à vivre et nous avions décidé de ne pas y amener les enfants, et maman. Nous n’irons voir le camp que de l’extérieur et cela est déjà bien suffisant. Pour illustrer, nous avons aussi choisi de montrer aux filles “La vie est belle” de Roberto Benigni. Nous avons regardé une première partie hier soir et nous poursuivrons ce soir. Ce film est toujours une merveille de dérision de l’idéologie fasciste et nazie. Évidemment, nous apportons les connaissances historiques qu’il faut avoir pour comprendre. Mais le film est drôle et agréable, tout en n’enlevant aucunement le poids de la tragédie. Les filles voient la locomotive, les wagons à bestiaux, l’entrée du camp, les baraquements.
Nous sommes bien là, à l’endroit où l’histoire s’est déroulée. Même si les nazis ont détruit les chambres à gaz et autres fours crématoires pour faire disparaître toute trace de l’horreur avant de quitter les lieux, le site est toujours là, chargé de sa puissance évocatrice.
Nous avons passé du temps à parler de l’histoire devant les barbelés, nous avons fait devoir de mémoire, et puis nous sommes passés à autre chose.
Mine de sel de Wieliczka
Sans transition, nous nous apprêtons à visiter la mine de sel de Wieliczka. Deux heures de visite guidée en parcourant 3,5 kilomètres de galeries souterraines jusqu’à 135 mètres de profondeur.
Une mine de sel ? Je ne savais même pas que l’on pouvait produire du sel ailleurs que dans des salines. Heureusement, cette fois-ci nous échappons à la visite en polonais et rejoignons un groupe anglophone. Nous allons pouvoir en savoir un peu plus. Ou pas. La visite est riche et longue, mais aucune démonstration sur le thème, comment fait-on du sel à partir d’un caillou aujourd’hui ? Le soir, j’appelle mon joker, mon Papa est géologue et le sel gemme, le sel de roche, il connaît un peu. Aujourd’hui les roches sont aspergées pour faire fondre le sel, puis l’eau est évaporée. Seulement, aujourd’hui cette mine ne produit presque plus de sel car son prix a chuté. Une petite production est conservée pour les touristes et c’est cette activité qui fait désormais les revenus de la mine. Classée au patrimoine de l’Humanité, le site est l’endroit le plus visité de Pologne.
Nous commençons la visite par… attendre. Attendre que le groupe anglophone soit constitué. Par chance, nous avons le droit à ce moment-là à un chaud rayon de soleil. Et donc d’une glace ! À 16h, ça commence vraiment. Masques sur le nez, nous entrons dans la mine avec un petit groupe de vingt personnes et commençons par descendre quelques marches. Quelques marches ? Mais ça n’en finit pas cet escalier ! En se penchant au dessus de la rambarde, la perspective est infinie. 364 marches nous font descendre au premier palier situé à 64 mètres en dessous du sol. Vertigineux. Et ça continue. La visite labyrinthique passe de salle en salle, chacune creusée pour extraire des blocs de pierre, puis renforcées par des poutres de bois. Chacune plus grande les unes que les autres. Cet endroit est absolument incroyable. Les mineurs, très croyants, ont aménagé 45 chapelles dans la grotte, pour les protéger des dangers du métier. Les poutres et les sculptures, parfois vielles de plus de 300 ans, sont intactes, protégées par l’ambiance saline des lieux. Depuis le XIIIe siècle, Wieliczka exploite son gisement de sel gemme souterrain sur 9 niveaux et 300 km de galeries. C’est la plus ancienne mine de sel d’Europe. A une centaine de mètres de profondeur se trouve la plus belle salle de la mine : la chapelle de la bienheureuse Kinga de Pologne, entièrement de sel. Sol, reliefs, statues, sculptures et même les lustres. Plus bas encore, un lac souterrain, tout éclairé de bleu pour rendre l’endroit plus magique encore.
La visite se termine évidemment à la boutique où l’on peut acheter ce sel. Et puis heureusement, des ascenseurs sont prévus pour remonter à la surface. Nous sortons, au milieu du village, entre l’église et la poste. Mais où sommes-nous ? Le guide est toujours là pour nous indiquer le chemin du retour qui se fera sous une pluie battante. Épuisés.
Ce soir, nous rejoindrons un spot à la périphérie de Cracovie, devant les jardins ouvriers. L’endroit est vert, très tranquille et un peu passant. Beaucoup viennent s’y promener. Demain, nous n’aurons qu’un bus à prendre pour aller visiter la ville.
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