Dimanche 9 août 2020. Dargocice, Pologne. La fraîcheur est tombée, les bruits de la plage ont été lointains et nous avons finalement bien dormi. Mais pas envie de sortir le paddle ici, envie de de décamper. Le frigidaire est vide, il nous faut faire les courses et en profiter pour faire les achats de rentrée pour les filles car nous avions prévu de les faire en Pologne, un peu moins cher qu’en France. Direction le gros Carrefour de Szczecin, à une heure de là. « Céline, vérifie si c’est ouvert, on est dimanche tout de même ». D’habitude, tout est ouvert le dimanche matin, dans les pays Baltes, en Finlande, ailleurs,… Le dimanche est devenu un jour d’ouverture comme les autre partout en Europe. Sauf en Pologne. Non, le carrefour est fermé selon Google. Allons à Intermarché. Oui, selon Google ils sont ouverts. Mais non, en vrai ils sont fermés. Nous en tentons deux se notre chemin, fermés. Lidl ? Fermé. Biendronka ? Fermé. Netto ? Fermé. Faire ses courses un dimanche dans un pays très catholique, quelle idée tordue.
Tant pis, nous trouverons toujours quelques pâtes au fromage à cuisiner, nous ne sommes quand même pas totalement à sec. Nous trouvons de quoi faire le plein d’eau potable au port, c’est l’essentiel par cette chaleur. Nous nous rabattons donc sur notre visite du jour, la forêt tordue de Gryfino.
La forêt tordue
Impossible de se garer devant, mais possible de se garer derrière, sur un spot de pêche au bord de l’Oder, ce fleuve qui fait frontière avec l’Allemagne. Là, une succession de pêcheur y est installée sur toute la rive. Un concours de pêche vraisemblablement. Il fait très chaud, la végétation est très sèche, au sol la terre est noire et s’envole en une poussière fine. Nous trouvons une petite place sous une ombre chaude que la présence de la rivière à côté ne rafraîchit pas du tout.
Un repas froid, salade de betteraves sous vide et petits pois en boîte. C’est encore un peu tordu comme idée mais il faut faire avec ce qu’on a et être inventif. Heureusement, les filles aiment. Allez, courage, allons la trouver cette forêt tordue. Cette forêt est inscrite sur notre carte de la Pologne et les filles l’ont repéré depuis longtemps. Elles avaient hâte de la découvrir.
Mais là où nous sommes stationnés, rien n’est flêché, nous ne savons pas trop comment l’atteindre. Nous avons juste un commentaire sur Park4night dit que c’est accessible en une vingtaine de minutes à pied. Apparemment, il faut longer la rivière et prendre un chemin tordu vers l’est.
Malgré l’ombre des arbres, il fait vraiment très chaud. Capucine entre dans sa désormais habituelle colère « j’veux pas y aller, j’ai trop chaud, je veux rester au camping-car mais je veux pas que tu ne fasse pas la visite maman à cause de moi,… ». Elle disjoncte. Elle a peur de revivre la randonnée affreuse de Guadalpéral en octobre dernier en Espagne. Faire une rando un jour de canicule, quelle idée tordue.
J’arrive à la traîner jusqu’aux arbres tordus et la magie du lieu fait le reste. Des arbres en forme de J majuscule. Immédiatement, Capucine prend une feuille et les dessine. Elle me fait plaisir, même si elle continue de râler parce que son dessin ne lui plaît pas. Lison aussi dessine, elle entreprend de croquer sa Maman allongée sur un arbre comme sur un transat. Pierre, lui, est déçu. La parcelle d’arbres tordus est toute petite, juste 0,3 hectares, et vraisemblablement, les arbres semblent tordus par l’œuvre de l’homme, pas naturellement. L’endroit est protégé et un panneau explique que l’on ne connaît pas la raison de cette forme mais que selon toute hypothèse, elle semble être d’origine humaine, quatre vingt ans auparavant. Tordre des arbres, quelle idée tordue.
Quoi qu’il en soit, moi je trouve cet endroit très esthétique. Et même salvateur. Des nuages se sont intercalés entre nous et le soleil et l’orage gronde. C’est bien la première fois en Carapate que nous prions pour voir tomber la pluie. Nous reprenons notre chemin de poussière noire et rentrons tout sales à l’Emile-Pat. Solène s’arrange même pour trébucher dans la poussière qui se colle donc à la sueur de sa peau. À défaut de pluie, nous avons la douche pour nous rincer, les pieds pour les uns, tout le corps pour les autres. La pluie, elle, arrivera juste au moment où nous aurons décampé. Tant pis, nous n’auront pas pu danser sous la pluie.
Arrivée en Allemagne
Fin de partie pour la Pologne. Nous l’aurons traversée aller-retour. Nous voilà passant l’Oder et arrivant en Allemagne. Quelle sensation étrange, un pays connu, nous avons l’impression d’être si près de chez nous. Dès la frontière, nous croisons des cyclistes sous la pluie, en chaussettes et claquettes. Des chaussettes dans des claquettes, quelle idée tordue. Nous sommes bien en Allemagne.
Un peu de route. Une pause goûter dans le joli parc urbain d’un petit village. On ne manque jamais de chocolat dans l’Emile-Pat. Les filles trouvent un bateau pirate et un jeu d’eau pour se rafraîchir. Pierre un lac pour s’y plonger. Il n’est pas le seul à se baigner mais l’eau y est verte, croupie et malodorante. Encore une idée tordue.
Ich bin ein Berliner
19h. C’est incroyable mais nous sommes à Berlin. Déjà. Nous avons trouvé un spot près d’un parc, dans un quartier résidentiel de Berlin-ouest. Pas loin du tram et pas trop passant. Nous nous plaisons. Un petit repas local pour fêter ça ? Il y a un biergarten au club de tennis, de l’autre côté du parc, huit minutes de marche. J’appelle, ils sont ouverts bien ouverts, eux.
Le parc semble à l’abandon. Les herbes folles nous cacheraient presque la petite vue vers le nord. Le biergarten lui semble sympa, simple et sans chichi, des jeux d’enfants au fond. En s’asseyant, nous demandons s’ils prennent la carte visa. Non. Aïe. Nous sommes en Allemagne. Nous n’avons pas assez d’euros. Le serveur indique à Pierre un distributeur, à dix minutes à pied… Courageux, il y va. Et ne trouve pas. En l’attendant, j’ai traduit toute la carte et rien ne me plaît. Ragoûts, goulashs, saucisses. En accord avec Pierre, je nous excuse auprès du serveur et nous prenons la poudre d’escampette. Ne pas prendre les cartes bancaires, en voilà encore une idée tordue.
Alors que nous partons, la pluie se met à tomber. Mais tomber dru, une grosse pluie d’été qui mouille bien. Hé bien voilà, nous l’avons notre pluie pour danser ! Capucine est aux anges. Au lieu de grogner, elle est trop heureuse de cette petite aventure. Lison et Solène, courageuses, ne se laissent pas abattre mais ne sont tout de même pas enchantées par la situation. Un pull sur la tête, ou un sac, elles avancent sans se plaindre. À la maison, c’est pâtes au fromage, avec un petit pot de sauce lituanienne, aubergine-prune et… épices. Mais ça, ce n’était pas marqué sur l’étiquette et j’ai mélangé tout le pot avec les pâtes. Aïe, trop épicé pour les filles, elles ne peuvent pas manger. Vite une idée : « Mettez du sucre, ou de la confiture, dans vos pâtes, pour atténuer le goût ». Merci l’idée tordue : en fait c’est devenu encore plus piquant.
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