Tallinn la médiévale

Mardi 14 juillet 2020. Tallinn, Estonie. Nous nous sommes couchés tard hier soir et nous nous levons tard. Nous prenons le temps, quelque chose me dit que la journée sera longue. Au programme, déambulation dans le centre historique de Tallinn.

Parking d’européens

À 10h30, nous sommes sur le point de partir, quand un voisin de parking vient nous parler. Une petite famille polonaise en vacances en van dans les Pays Baltes. Leur grand chien noir joue avec Baba depuis hier soir, les deux s’entendent très bien… Heureusement qu’elle est déjà stérilisée. Puis c’est l’allemande et son shih tzu qui se joint à nous. Explications entre les trois chiens, le troisième doit se tenir à carreaux. Mais les maîtres n’interviennent pas, ils les laissent gérer leurs relations de chiens et ça se termine bien. Avec son mari, l’allemande se prépare à prendre le ferry aujourd’hui pour la Finlande. Ils voyagent dans un énorme camion 4×4 habitable flambant neuf.

Visite du centre ville de Tallinn

Mais les enfants protestent maintenant, ils ne comprennent rien à nos conversations en anglais et réclament d’aller visiter la ville. Salutations.

Reval, ville danoise

La vieille ville de Tallinn est classée au patrimoine mondial de l’humanité. Aux IXe et Xe siècles, Tallinn est une place de commerce très importante, connue jusqu’en Scandinavie et en Russie. Une forteresse en bois, construite sur la colline de Toompea, protège le port. En 1219, elle est envahie par les Danois qui construisent une forteresse en pierre. Ils la nomment Reval, d’après le nom de la province, Revala, dont elle est le centre.

À cette époque également apparaît le nom de Tallinn, formé par contraction de Taani linn « ville danoise », utilisé par les autochtones. Au Moyen Âge, Reval est riche et prospère. Membre de la Hanse, cette association de villes commerçantes du nord de l’Europe, elle est notamment au centre du commerce du sel.

Les chevaliers Teutoniques

Achetée par l’ordre des chevaliers Teutoniques en 1346, la ville connaît une forte immigration allemande. Une importante population commerçante et ouvrière allemande habite à Reval jusqu’en 1918 ainsi que des descendants de la noblesse germano-balte, les estoniens étant plutôt ruraux.

Ville suédoise alors ? Oui mais russe

Elle passe ensuite sous la domination suédoise dès 1561, puis russe en 1710. La présence russe est continue pendant trois siècles. À l’époque de l’Empire russe, l’aristocratie germano-balte tient le parlement local et l’allemand est langue officielle au côté du russe. En 1941 lors de l’invasion allemande, les Soviétiques se battent pour protéger leur base navale mais sont contraints de l’évacuer. Bien qu’intensivement bombardée par l’aviation soviétique pendant les dernières phases de la Seconde Guerre mondiale, une grande partie de la vieille ville médiévale a été épargnée.

Tallinn médiévale

Notre journée ne sera qu’une déambulation rêveuse dans la cité médiévale. Le quartier Bas et ses vieilles maisons, la porte de Viru et sa petite place de marché. Une bonne partie des tours et remparts sont conservés, ainsi que les maisons et leur système de poulies pour monter les marchandises au grenier. Sur une jolie place proche de l’hôtel de ville, le délire médiéval est poussé très loin.

Restaurant aux menus moyenâgeux, boutiques de fioles et potions magiques, serveuses en costumes. On se croirait dans un parc d’attraction. Les terrasses sont vides, les touristes absents, les menus affichent une ristourne d’emblée de 20 %. Nous, nous avons gardé cette adresse de restaurant populaire que nous avait donné notre pâtissière américaine hier, nous ne nous ferons pas attraper par cette foire déguisée.

Nous passons à la ville haute, la porte des jambes courtes, toute en escaliers. Toompea, le château de Tallinn. Accroché à une ancienne tour médiévale, le gouvernement estonien est installé dans une aile du château de style baroque et néo-classique construite pendant la domination russe. L’accolade des deux donne un style remarquable à ce palais qui n’a d’un coup plus grand chose de médiéval.

Restaurant

Pööbel, c’est le nom de notre restaurant. Inoubliable. Ici nous ne serons pas seuls en terrasse, abrités sous les arbres d’un petit parc. Les bâtiments sont en bois peints d’un style déjà scandinave, nous aimons immédiatement. Les enfants, eux, adorent. Dans le bâtiment, une salle de jeu leur est carrément réservée. Nous arrivons à peine les garder avec nous pour choisir leur plat, ils courent rejoindre leur salle.

Tranquillité. Au bout d’une année entière de vie commune à 100%, il faut avouer que nous adorons nous séparer un instant. Les plats sont simples, bons, et de style scandinave. Burger au saumon, hareng, salade de patates, viande panée… Nos papilles sont délicieusement dépaysées.

La pause sera longue et très agréable, et nous retournons explorer le quartier du château que nous avons traversé rapidement à l’aller. En en faisant le tour, nous trouverons de beaux points de vue sur la ville, médiévale en dessous, et moderne à l’horizon. 16h, ça ne fait pas longtemps que nous sommes sortis de table mais nous retournons nous attabler. Pour le dessert cette fois. Ou le goûter, cela dépend de l’appréciation. Nous avions noté hier cette adresse d’une vieille pâtisserie au style Belle époque parisienne. Banquettes en velours rouge et plafond à caisson.

Maiasmokk, le bec sucré en estonien, est le plus ancien café de la capitale. Déjà au moyen âge, on y fabriquait ici du massepain, de la pâte d’amande, réputée  pour guérir les peines de cœur. Ici, le confiseur George Stude, approvisionnait  les Tsars russes. La vitrine, faites d’adorables figurines en pâte d’amande nous avait déjà tapé dans l’œil hier soir. Un café pour les parents, une gourmandise pour les enfants, nous voilà prêts à repartir une troisième fois à l’assaut de la ville, voir une dernière partie de remparts. Tiens, ici on tourne un film, dans une ruelle à l’aspect tout à fait moyenâgeuse. Tient, là une antiquaire où l’on farfouille allègrement dans une valisette contenant de jolis badges aux dessins désuets.

De nouvelles rencontres avant la Finlande

Nous rentrons à la maison, au parking plus exactement, comblés de cette longue journée. Le temps d’une pause dans l’herbe, des enfants français viennent jouer à côté. Des bretons, Josserand 7ans et Judicaëlle 10 ans, partis en van en voyage de six mois en mars… rentrés en France début avril. Confinés. Faux départ. Leurs parents viennent nous rejoindre et nous rigolons ensemble de nos mésaventures. Depuis juin, ils sont repartis, Allemagne, ferry, Lituanie, Lettonie, Estonie. Ils s’apprêtent à visiter Tallinn avant de passer en Finlande. Ha, comme nous.

Hé bien non, la journée n’était pas terminée. Nous voilà partageant un interminable apéritif pendant que nos enfants, trop heureux d’avoir de nouveaux amis, disparaissent dans les camions. Et d’un seul coup, il est minuit. Nous n’avons pas vu le temps passer, nous n’avons surtout pas vu le soleil se coucher. Le ciel est encore orange. Dingue.

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