Voir la Sixtine, cet exploit

Vendredi 27 décembre 2019. J180. Rome. La marraine de Capucine nous avait un donné un défi. Prendre une photo de la crèche de poche qu’elle a offerte à Capucine, dans la Chapelle Sixtine. Elle a appelé l’une de ses filles Sixtine et n’a jamais encore eu l’occasion de voir la Chapelle. Aujourd’hui, nous serons ses explorateurs.

À vrai dire, nous n’avions pas attendu son défi pour avoir envie de voir le chef d’œuvre de Michel-Ange. Mais la mission attise la motivation des filles et… il nous en faudra de la motivation…

Astuce : avoir un bébé avec soi

Car en ce 27 décembre, après deux jours de fermeture, le musée du Vatican rouvre ses portes et nous ne sommes visiblement pas les seuls à avoir prévu de le visiter. Combien… 200, 300 mètres de file d’attente ? Non, je dirais 500 mètres à 11h. L’horaire horrible. Immédiatement, un agent s’adresse à nous pour nous expliquer que les familles qui ont de jeunes enfants sont prioritaires. Alléluia ! Munis de notre bébé coupe-file, nous doublons tout le monde en les taquinant du regard et arrivons quasi immédiatement à la billetterie. Ouf, nous avons évité le calvaire ! Où est donc notre Chapelle ? Le plan est difficile à comprendre. Le flux de visiteurs est très clair : c’est par là. Il n’y a plus qu’à se laisser emporter par le courant.

Musée du Vatican, comme chez Ikea

Pour accéder à la Chapelle Sixtine, il faut parcourir plusieurs salles du palais et un long long couloir. Il y a un circuit, à suivre dans l’ordre indiqué. Comme chez Ikea, en pire. Impossible de prendre un passage secret. Sauf qu’ici, la déco est d’un autre genre. Baroque, antique, des statues, des tentures, des mosaïques, des cartes géographiques… Un déballage d’or et d’art, toute la richesse de ce petit pays. Mais au bout du long couloir, les choses se corsent. Le large flux de visiteurs doit emprunter un étroit couloir. Embouteillages garantis. Pire que dans le métro parisien. Et pas d’issues de secours. Il ne faut pas être claustrophobe. Après de longues minutes à retenir notre souffle, ouf, nous arrivons.

La Chapelle est noire de monde, évidemment. Et un homme charmant fait la circulation en scandant “No photo, no photo”… Et notre photo de crèche dans la Sixtine !? Heureusement, il y a de longs bancs sur les côtés et nous y trouvons une petite place. De là, nous pouvons enfin la voir, cette Chapelle. Toute la voûte est peinte de différentes saynètes qui représentent la genèse. On la connaît si peu quand on n’est pas venu ici. La représentation de Dieu créant l’homme à son image n’est qu’une toute petite partie de l’œuvre. La fresque est une des plus grandes au monde, 40 mètres de long sur 13 de large. Michel-Ange la peinte en quatre années, seul. Les couleurs sont étonnantes. Des roses pastel, des jaunes citron, des verts acides, des bleus lapis-lazuli, des mauves saturés. Elles ont été restaurées entre 1981 et 1989.

Défi

Et notre photo alors ! Discrètement, Pierre et Capucine prennent leur cliché pendant que l’homme continue de s’égosiller “No photo, no photo”. Le courant humain peut nous emporter de nouveau. La sortie de la Chapelle est comme l’entrée, un couloir étroit. Ouf, nous sortons de là. Au soleil des jardins du Vatican, nous grignotons notre pique-nique. Alors, par où doit-on passer pour voir maintenant “l’école d’Athènes” de Raphaël ?… Noooonnn, les salles de Raphaël sont tout à côté de la chapelle, dans la salle de la signature ! Il nous faut donc reprendre le même circuit !!! Pas question de ne pas y aller, nous reprenons notre respiration et replongeons dans la marée humaine.

L’école d’Athènes

La salle de la signature doit son nom au fait que le Pape y paraphait les documents officiels. Il y recevait également les représentants des communautés chrétiennes. Alors, sur ses fresques, Raphaël a voulu signer un message à l’adresse de la chrétienté. D’un côté, “le triomphe de l’eucharistie”, rappelle les vérités chrétiens. De l’autre, “l’école d’Athènes”, réuni les philosophes et les savants de l’antiquité, et montre la dette de l’Eglise vis-à-vis des maîtres de la pensée et de l’art. Image symbolique d’une réconciliation de la raison et de la foi. Platon discoure avec Aristote. Et Héraclite, Euclide, Pythagore, Epicure, Diogène, Socrate, Zénon et Ptolémée sont présents. Pour les représenter, Raphaël leur donne le visage d’autres grands noms, artistes pour la plupart. Aristote est représenté sous les traits de Léonard de Vinci, Héraclite sous ceux de Michel-Ange, Euclide sous Bramante, l’architecte de la Basilique Saint Pierre. Raphaël lui-même s’en caché dans son œuvre, regardant les spectateurs, d’un œil curieux.

A la librairie

Et le flot humain nous emporte à nouveau. Au-revoir merveilles. Nous avons accompli cet exploit de voir la Sixtine, puis les Stanzes, nous pouvons rentrer chez nous. Un bus, toujours à l’œil, nous ramène au centre de Rome. Nous avons un dernier rêve à accomplir aujourd’hui : magasiner dans la librairie française de Rome. Nous l’avions repéré mardi quand elle était fermée. C’est la première fois de notre voyage que nous trouvons une vraie librairie remplie de livres pour enfants en français ! Ce soir, avec l’argent reçu pour Noël, c’est encore Noël. Nous passons un temps fou à fouiner, à regarder chacun des livres du rayon littérature jeunesse. Chacun embarque ses envies sous le bras, et après, il faut faire un tri drastique. Mais le bonheur est là. C’est comme trouver une source quand on est assoiffé.

Taxi

19h. La librairie ferme quelques minutes après notre sortie. Cette fois-ci, nous rentrons vraiment chez nous. Place de Venise, nous attendons notre bus. 10 minutes. 20 minutes, 30 minutes. Les filles jouent ensemble ou lisent. 45 minutes. Ce n’est pas possible !  Pierre et moi commençons à envisager une autre solution. À pied ? Une heure de marche et des bouts de route dangereux. En Taxi ? Aïe, combien ça va nous coûter… Mais pour l’instant, les filles jouent et ne se préoccupent pas de la situation. Elles sont incroyables. Nous les faisons marcher du matin au soir, et là, il fait froid et nous piétinons sur un trottoir noir de monde, elles jouent. Et rigolent à gorge déployée. Une heure. Une heure et quart. Ça y est, elles commencent à se rendre compte que la situation n’est pas normale. Elles ont froid. En toujours pas de 118 à l’horizon. Nous traversons la place pour rejoindre la station de taxi. “Bonjour, nous voulons aller à l’aire de camping car. Oui, vous avez l’adresse ? Non. Sans l’adresse, je ne peux pas vous y emmener.” Mon téléphone est éteint, je ne peux pas lui donner une adresse. “Laissez moi chercher sur votre téléphone, je vais vous dire.” En fait, je ne connais pas non plus le nom de cette aire, mais je sais la localiser. Là, vers le sud. Nous trouvons. Le chauffeur se marre. “Sans adresse, je ne peux pas ! C’est grand Rome, vous savez ! Je ne connais pas tout !” Oui, merci… Mais nous, sans téléphone, nous sommes perdus ! 11€ la course, ça ne valait pas le coup de s’en priver. Nous sommes trop heureux de retrouver notre maison toute froide. Le chauffage va-t-il s’allumer ? Ouiii ! C’est un vrai soulagement à chaque fois. La température remonte. Nous pouvons dormir tranquillement. Demain, nous quittons Rome.

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